lundi 25 janvier 2016

Les Huit salopards de Quentin Tarantino : un huit-clos extravagant




L'histoire

Tout commence par un blizzard. Un blizzard à vous coincer les huit pires truands de l'Amérique post Guerre de Sécession dans les montagnes du Wisconsin. Warren (Samuel L.Jackson), un chasseur de prime dont le vieux canasson n'a pas survécu à la rudesse de la tempête arrête l'équipage de John Ruth dit le Bourreau, lui aussi chasseur de prime de profession, se rendant à la mercerie de Minnie, avec Daisy Domergue, la criminelle enragée et raciste dont la valeur s'élève à 10.000 $. Même s'ils sont de vieilles connaissances, Ruth ne laisse entrer personne aussi facilement, et s'en suit un cérémonial et des échanges burlesques pour parvenir à ses faveurs.
Quelques kilomètres plus tard, c'est au tour du futur shérif de Red Rock, Chris Mannix, un sudiste pure souche loin d'être une lumière, les oblige à les prendre avec eux s'ils veulent récupérer leurs primes.
Une fois arrivés, ce n'est pas Minnie qui les accueille, mes quatre autres personnages, un cow-boy, le bourreau de Red Rock, un Mexicain, et un général Confédéré qui se trouvent à l'intérieur. La civilité et les bonnes manières de chacun vont être mises à rude épreuve....

Les dialogues, virtuosité intellectuelle et outrancière


Dans les Huit salopards, ça ne fait QUE parler. Le contexte joue beaucoup. Il faut dire qu'il n'y a pas grand chose d'autre à faire quand la neige empêche toute activité, tout déplacement. Rappelons également que l'intrigue se déroule quelques années après la guerre de Sécession.

Loin des débuts du Far West et de leur violence, les rapports deviennent davantage civilisés, les noirs ne sont plus soumis à l'esclavage. N'en reste pas moins une vive tension entre les perdants Sudistes et les Nordistes. Le discours devient alors une arme de choix : déstabiliser l'autre pour démêler le vrai du faux, faire rire pour détendre l'atmosphère, faire diversion, raconter sa propre histoire,...

Car oui Tarantino fait tout pour que la réalité et fiction soient deux concepts tangibles, risibles. D'abord, des noms invraisemblables : "Oswaldo Mobray", "Minnie", "Mannix", un ancien Sudiste issu d'une fratrie sanguinaire comme futur shérif, un cow-boy qui rend visite à sa maman pour la Noël... On comprend que Ruth et Warren soient dubitatifs...

Des dialogues à rallonge, que seule une bourrasque de vent et de neige semble mettre fin, on se délecte des jeux de mots, d'un langage aussi grossier que brillant.



La patte cinématographique de Tarantino


Fidèle à lui-même et à sa conception du cinéma, refusant le numérique, les scènes sont tournées au format 70mm : "C'est l'image la plus large qu'on puisse produire et cette caméra donne à l'image un aspect événementiel", déclare-t-il dans Culturebox. Il ajoute également dans La Presse, "Il permet aussi de créer un espace encore plus intime. Samuel L.Jackson n'a jamais eu droit à d'aussi beaux plans rapprochés. Et puis, il peut toujours se passer quelque chose à l'arrière-plan. On surveille la scène comme une partie d'échec."

Cela donne à voir au spectateur des paysages sublimes, de la matière et une lumière pure. Chez Tarantino, le réel réside davantage dans l'image que dans l'histoire.

Ne vous inquiétez pas, avec huit truands, la violence est au rendez-vous, et la bande-son est toujours aussi frappante.

2h48 où le spectateur se laisse embobiner avec plaisir par le cinéaste. On en redemande !



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